Jeux Olympiques : «Carl Lewis – Ben Johnson, c’était une vraie haine»
La rédaction

A quelques semaines de l’ouverture des Jeux Olympiques de Paris 2024, Vincent Di Serio publie « On ne gagne jamais seul – Les plus beaux duels de l’histoire du sport », chez Plon. Le journaliste revient sur les affrontements historiques et spectaculaires des 120 dernières années et prend le temps d’en évoquer trois mythiques au 10 Sport. Interview.

Pourquoi avoir eu envie de mettre en avant les « duels » pour évoquer la thématique des Jeux Olympiques ?
Disons que dans les grandes rivalités du sport, il y a une dimension humaine qui est très forte. Cette dimension humaine est très forte parce qu'il y a la colère, la tristesse, la frustration, la joie. Il y a beaucoup d'émotions et on ne peut être qu'en empathie. Quand deux sportifs ou deux sportives s'affrontent vraiment pour l'Or, pour le titre de champion du monde, on ressent toutes ces émotions-là. À un moment donné, on est obligé de s'identifier à l'un ou l'une de ces personnes. C’est mon cas (sourire).

Parmi ces duels mythiques, difficile de ne pas penser en premier à celui qui a opposé Ben Johnson à Car Lewis à Séoul, en 1988… Pourquoi a-t-il autant marqué les esprits ?
On va dire que Carl Lewis et Ben Johnson, c'est un duel qui arrive à un moment de l'histoire du sport où il commence à y avoir vraiment un peu le « sport business », dans les années 80. Un intérêt grandissant des médias et des sponsors. Lewis et Johnson se sont détestés par médias interposés, ils ont fait des déclarations. Aujourd’hui, ça serait impensable ! Le clan Lewis l'a très mal vécu. C'était une vraie guerre, une vraie haine. Jusqu'à la finale de 1988 où Ben Johnson a été reconnu coupable de dopage.

« Jean Bouin était dévasté… »

Moins connu mais tout aussi historique : Jean Bouin conte Hannes Kolehmainen. Racontez-nous…
C'est un peu le premier « grand duel ». A l'époque, le vrai sport moderne est né à la fin du 19e siècle. Les grands événements sportifs, jusqu'en 1912, c'était des événements qu'on organisait en annexe d'autres grands événements. Jean Bouin, c’était vraiment le premier grand champion, le premier à battre des records sur le kilomètre, sur 5000 mètres, sur 10 000 mètres. Toute la délégation française l'a chouchouté et l'a mis dans les meilleures conditions possibles pour apporter la médaille d'or à Stockholm, en 1912. Sauf que face à lui, il avait quelqu’un... Hannes Kolehmainen. Jean Bouin, il veut impressionner Kolehmainen dans les épreuves qualificatives. Bouin bat le record du monde, justement, en demi-finale, pour essayer vraiment d'impressionner à distance son adversaire, lui faire peur. Donc les deux hommes se retrouvent en finale. Très vite, les deux prennent une avance considérable sur le reste des concurrents. Et finalement, c’est Kolehmainen qui l’emporte devant Bouin, qui lui est dévasté. Et il faut savoir qu'à cette occasion, ils ont pulvérisé un record du monde. De mémoire, je crois, d'une trentaine de trente secondes !

Un duel impliquant un autre Français, légende du sport tricolore : David Douillet, qui a de nombreuses fois affronter Shinichi Shinohara
Après ses premiers titres olympiques et ses premiers championnats du monde en 1995, David Douillet a connu vraiment beaucoup de blessures. Il a été handicapé au point de perdre sa domination sur le judo mondial, dans une catégorie où il y avait un autre géant, Shinichi Shinohara. Et Shinohara, c'était quelqu'un de très intimident, qui faisait peur. Il était très grand, il avait un visage, il avait un regard… Et Douillet a réussi, mentalement notamment, à se remettre de ses blessures. Il avait un ostéopathe qui a réussi à faire des miracles sur son organisme. Et Douillet, au jeu de Sydney, il était loin d'être favori et c'est le seul qui a réussi un peu à le déstabiliser mentalement, qui a réussi à le contrer, puis finalement à le dominer en finale de Sydney pour conserver sa médaille d'or. Ce qui est un exploit inouï, historique.

Quel duel allez-vous suivre tout particulièrement pour les prochaines Jeux de Paris ?
Je pense à la France et au Danemark, au Handball, qui s'affrontent en permanence dans tous les championnats d’Europe et du monde. C'est impressionnant. Un coup c'est la France, un autre c'est le Danemark qui gagne. Ce n'est pas une rivalité qui va à sens unique. La France et le Danemark, ça va être un peu encore le nouveau face à face, le nouveau duel par équipe qui promet, d'autant plus qu’au dernier championnat, la France s’est imposée contre le Danemark, donc il y aura certainement une revanche à prendre côté danois, donc ça risque d'être très intéressant…

Par Quentin Bionier

« On ne gagne jamais seul – Les plus beaux duels de l’histoire du sport », édité par Plon, est disponible le 16 mai 2024

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